
« Le rôle de prescription du négoce est évident, peut-être même encore plus aujourd’hui. »
Entre l’effervescence des vendanges et les reflets bruns de l’automne, François-Xavier Maroteaux, Président et Co-Propriétaire du Château Branaire-Ducru s’est confié à Caroline Meesemaecker. Dans cet échange, il revient sur le rôle central de la place de Bordeaux, un modèle collaboratif unique, où propriétés, négociants et courtiers travaillent main dans la main pour faire rayonner les vins dans le monde entier. Découvrez une réflexion passionnante sur l’avenir de Bordeaux, portée par l’âme d’un Grand Cru.
Tu as quitté le monde de la finance pour prendre la tête d’une propriété viticole. Si tu devais décrire ton parcours en trois mots depuis ce changement, que dirais-tu ?
« Je dirais tout d’abord « apprentissage », car je ne viens pas du monde du vin, même si ma famille y est impliquée depuis longtemps et que j’ai grandi dans cet univers. Il y a énormément à apprendre : les marchés, les intervenants… Il a fallu d’abord assimiler tout cela.
Ensuite, « innovation ». Avec le changement de génération, nous avons cherché à innover, notamment avec un nouveau cuvier qui nous apporte déjà beaucoup et continuera à nous aider à avancer.
Enfin, « précision ». Précision dans le style des vins, pour qu’ils aient une signature constante chaque année, tout en respectant ce que la nature offre. Nous ne pouvons pas produire exactement le même vin chaque millésime, mais nous maintenons une philosophie et une identité précises. Ce nouveau cuvier nous aide à atteindre cet objectif.
La précision s’applique aussi à notre distribution. En travaillant étroitement avec le négoce et en analysant les statistiques de vente, nous identifions les marchés à privilégier ou à développer. »
Comment perçois-tu le modèle de la place de Bordeaux ? Te semble-t-il suffisamment collaboratif avec les châteaux ?
« Je suis convaincu que c’est un bon modèle. Beaucoup de grandes marques internationales choisissent la place de Bordeaux, ce qui prouve sa pertinence.
Cela dit, dans des périodes plus complexes, il est normal de se poser des questions. Nous devons renforcer l’efficacité et la rentabilité des actions entre la propriété, le négoce et le courtage. Pour cela, il est essentiel de mieux collaborer, d’optimiser nos efforts et de continuer à promouvoir nos vins ensemble.
Un négociant qui connaît bien nos vins est un atout majeur. Nous travaillons avec une centaine de maisons de négoce, soit 400 à 500 commerciaux qui parlent quotidiennement de nos vins. Leur rôle de prescription est clé. Nous devons continuer à travailler main dans la main pour que tout le monde y gagne : propriétés, négoce et courtage.
Bordeaux reste une région très regardée et appréciée, mais les jeunes générations découvrent des vins du monde entier, parfois au détriment des vins bordelais. C’est pourquoi il est crucial de faire déguster nos vins. »
Tu parles souvent d’aller sur le terrain pour promouvoir vos vins. Peux-tu nous en dire plus ?
« Oui, c’est indispensable. Je reviens de Londres où nous avons organisé des dégustations, que ce soit dans le cadre de l’Union des Grands Crus, avec un distributeur, ou auprès de petits groupes de consommateurs. Faire goûter nos vins est essentiel : si une personne aime le produit, elle devient un ambassadeur à vie.
Nous multiplions ces efforts à l’international pour faire connaître notre marque. En parallèle, nous avons rénové nos installations œnotouristiques à la propriété. Quand des amateurs de vin que nous rencontrons à l’étranger décident de visiter Bordeaux, ils viennent souvent nous voir.
Il est alors crucial de bien les accueillir, de prendre le temps de leur expliquer notre démarche. Lorsqu’ils rentrent chez eux avec une ou deux bouteilles, ils partagent leur expérience avec leurs proches. Ce bouche-à-oreille est une des meilleures formes de recommandation. »
Et c’est comme ça que Branaire continuera à être goûté dans le monde entier ?
« Exactement. C’est ainsi que nous consolidons notre présence dans une centaine de pays, et nous espérons encore nous développer, tout en veillant à ce que cette présence reste équilibrée à travers le monde. »